3
décembre
2012

L’assise tranquille

Depuis la mi-septembre, la séance Tai Chi Chuan du jeudi 11h00 est précédée d’une demi-heure d’assise méditative. Je savais précieux le suspens de l’agitation habituelle mais je n’osais le proposer tant le mot « méditation » pesait lourd de ses connotations spirituelles, religieuses et ascétiques. Les stages de Danza Duende sont émaillés de courtes pratiques d’intériorisation et la simplicité de l’approche m’a convaincu. Aujourd’hui, un temps d’assise tranquille ouvre  la séance de Taichi.

Cela s’appelle  – Vivre en amitié avec soi-même!

Le thème initial est celui de l’oeuf.

La forme ovoïde permet d’inscrire le corps en posture assise. L’image est plastique, modulable à souhait, elle facilite des représentations qui autorisent diverses mises en oeuvre de soi. La coquille présente un dôme et un fond, tête et pelvis forment les 2 pôles. Elle est solide et poreuse; elle délimite et permet la communication. L’intériorisation dans sa coquille n’est pas un enfermement mais un préalable utile à la clarté du propos : reprendre l’aventure de la construction de soi.

En arrière, le dos et le dossier, nous sommes adossés à la colonne vertébrale, notre charpente osseuse, pilier de notre redressement.

En avant, la face, la poitrine et le ventre dessinent la panse, des contenants faisant écho à diverses modalités symboliques de notre présence:

En bas, le bassin, l’assise et le réservoir des possibles – les tripes et la force intime, le sexe et le vouloir-vivre.

Au milieu, la poitrine et le coffret thoracique, contenant de élans du coeur , de ses désirs et de ses freins

En haut, la tête et la boîte crânienne – lieu des représentations, de la conscience et de l’intelligence qui permet de changer les points de vue.

Tout est dans l’oeuf.

Le souffle est le fil conducteur, il porte la sensation qui chemine à travers le corps. Peu à faire et beaucoup à défaire, le sourire est là pour dénouer et lâcher ces tensions inutiles qui contiennent et empêchent l’expression d’une présence plus joyeuse.

Et tout commence avec TOI…

Au plaisir de vous rencontrer.

28
février
2009

Culture de soi, Sculpture de soi, … mais encore.

Dans le champ étendu des valeurs liées au Tai Chi Chuan, on envisage volontiers la culture de l’énergie dans la perspective du développement personnel:

Ca commence  avec soi

La pratique invite en effet à un mouvement global de retour sur soi. On part du corps et c’est par le corps et dans le corps que débute le chantier. L’approche privilégie une attention intériorisée pour ressentir ce qui encombre et fait obstacle à un accord plus serein avec soi-même.

C’est un processus : La conscience posturale permet l’abandon progressif des tensions parasites et, en retour, la détente autorise un alignement et un redressement  qui dégage le port de tête et leste le bassin. Une posture redressée et détendue ouvre la sensibilité, elle donne confiance en soi et résonne tout de suite sur la manière dont on appréhende l’espace alentour. Bien posé, on devient la référence – l’espace s’organise, on s’oriente et découvre la libre circulation. la mobilité et la fluidité des gestes réveillent un rapport dansant à la vie.

L’individu s’affirme dans la douceur et la détermination.

Mais ça avance avec l’autre

C’est ici, quand l’individu s’émancipe et rencontre les autres que prend sens la culture de soi. L’aspect solipsiste de la démarche se dépasse dans la relation. L’autonomie est le prélude à la rencontre. Cette clarification  permet l’identification et la différenciation. Contrairement aux apparences, la forme solo pré-arrangée n’invite pas à la conformité, Pas à la normalisation mais à la distinction.Pour aller vers la vie, la société et le monde, la Taichichuan étend ses principes à la relation. La détente et la confiance posturale sont la condition pour se mettre à l’écoute de l’autre. S’ouvrir, accroître sa  capacité à accueillir pour savourer et partager ce qu’il y a de bon dans la relation mais aussi augmenter sa capacité à en éviter les aspects néfastes, nuisibles ou toxiques.

Comment concilier l’ouverture et le choix de recevoir ou de ne pas recevoir.

La couleur martiale du Taichichuan propose diverses attitudes :

  • La terre – Quand l’agression est supportable, on neutralise le toxique en se connectant à l’intrus et, comme une prise de terre, on conduit à la terre les influences néfastes qui s’y neutralisent.
  • L’eau et l’air – Plus avant, Il s’agira de ne pas donner d’appui à l’agression en n’offrant pas de résistance ou en l’attirant dans le vide pour qu’elle s’annule dans l’inefficacité ou la chute.
  • Le feu de l’esprit –  retourne à l’envoyeur ses propres énergies en en recyclant le flux. Plus l’agression est sévère, plus elle frappera l’agresseur.

Ainsi, la pratique intériorisée qui peut paraître nombrilique n’invite pas, à mon sens , à un retrait du monde. Il y a une mise à distance du monde, du mondain et de l’agitation mais nul retrait.

Mais encore avec la société

Prendre soin de soi, à l’intime et dans la relation à autrui constitue une précaution capitale pour entrer dans la danse. Savoir prendre, savoir recevoir mais encore donner. Si l’individu est le niveau initial et fondamental de la relation, il conserve la puissance de  la socialisation. Dans les turbulences chaotiques de l’existence, chacun porte la possibilité de se faire noyau autour duquel s’organise le vivre ensemble. Ni le repli dans sa bulle, ni l’investissement sans distance mais un choix en accord avec ce que l’on sait et aime faire.

La culture Taichi est autant dans l’ouverture aux sciences et technologies, aux arts et aux lettres que dans la pratique méditative. Abandonner les tensions inutiles c’est aussi s’alléger des croyances qui asservissent ou justifient, des pouvoirs hiérarchiques installés et de tout ce qui ce qui empêche la jouissance d’une présence active au monde que l’on désire.

Les Ateliers de la Main Franche suivent ce fil conducteur, discret et exigeant à travers toutes les pratiques proposées comme autant d’occasions d’activer cette philosophie “taichi”.

Jean-Luc