9
février
2011

La Chute

Rapide, économique et simple,  la chute ouvre un champ d’exploration Tai Chi.

Les terriens

Nous vivons sur terre « comme des poissons dans l’eau » sans penser à l’air que nous respirons, à la pression atmosphérique qui nous pèse sur la tête et à l’attraction terrestre qui nous attire vers le centre de la terre.

Nous tombons sans cesse et le sol arrête notre chute en nous donnant la sensation de poids.

Nous sommes des êtres de chute au sens premier du terme. La chute libre nous est naturelle et tenir debout est un acte de résistance obstinée. La fatigue et le vieillissement nous ramènent à la terre, nous tombons  jusqu’à la tombe. Humblement, l’humus nous attend pour nourrir de nouveaux élans.

La détente

Comme nous sommes forcément très attachés à la terre, le plus simple, le plus confortable et le plus sage est de l’accepter pleinement et de se détendre. Vivons heureux en regardant la vie, quand la mort sera,  nous ne serons plus.

Le fait de se sentir bien, d’être bien dans son corps implique la gravité qui participe directement à la conscience de soi. Nous sommes graves, pesants et lourds mais cela n’empêche pas d’être joyeux.

La détente, l’abandon des tensions superflues sera le conseil récurrent de la pratique Tai Chi. Pas de ramollissement amorphe mais au contraire, le maintien d’un projet, d’une forme tendue vers un devenir, une invitation au voyage allégé des bagages inutiles.

L’exercice de la détente est sans fin, toujours remis en chantier par la persistance de tensions résiduelles acquises et par l’apparition de tensions renouvellées par les projets et les craintes.

La chute libre est un thème utile pour une détente plus profonde impliquant le système musculaire et son contrôle cortical et partant, une disposition mentale accueillante à l’égard de la vie.

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26
mars
2009

Être là, debout

Une question me revient régulièrement. Où est l’essentiel du TaiJiQuan en-deçà des mots et des gestes, des styles et des modes. Comment cela s’inscrit-il  dans la vie quotidienne et dans le partage.

Tout compte fait, la simple posture debout s’impose comme lieu, forme et moment fondamental de l’exercice; la détente en est l’axe principal.

Tenir debout  résume la présence individuelle, le rapport à soi, aux autres et au monde. L’idée n’est pas originale, le redressement caractérise le bipède humain. Le piéton par son pied, son poids et son pas marque son empreinte, sa posture et son allure.

La CHUTE

L’attraction terrestre ramène tout au sol. On tombe sans arrêt vers le centre de la terre et c’est l’alignement sur la verticale, la rectitude qui permet la plus grande économie de moyens et la plus grande autonomie.

Les forces qui nous mettent à terre sont prises en charge par des réactions toniques réflexes mais tous les déséquilibres posturaux ajoutent une dépense d’énergie pour compenser et intégrer un défaut d’alignement.Recherchant toujours un équilibre confortable, nous vivons cependant en instabilité permanente. Ce perpétuel réajustement soutient notre vigilance.

De toute évidence, nous devons lutter pour tenir debout, même à notre insu. Le Taijiquan  invite à ne pas se raidir dans la lutte mais plutôt à accepter consciemment et finement cette chute incessante pour en recycler les effets dans un grandissement. Paradoxe yin/yang, c’est en cultivant la chute que nous soutenons le redressement.

Comment activer ces forces avec douceur et efficacité? Par l’image

Le SABLIER

La chute du sable, grain par grain se fait par l’orifice inférieur et l’empilement du sable grain par grain se fait par le fond de sorte que la vidange nourrit l’entassement. Et voilà la dynamique contrastée Yin/Yang.

La forme du contenant conditionne l’empilement. On peux poursuivre l’expérience en retournant le sablier mais, dans la posture debout, c’est la pensée qui “retourne le sablier” et fait la continuité de l’expérience. L’écoulement du sable résonne avec la détente. Cela correspond grossièrement à l’abandon des tensions superflues dans la musculature périphérique mais, plus intimement c’est une sensation d’ouverture qui suit toutes les zones de resserrement articulaire comme les chevilles, les genoux, la hanche, les étages vertébraux et costaux, les mâchoires et l’articulé dentaire.

Une vision plus énergétique prend en compte toutes les zones de passages souvent soulignées par le vêtement, zones qui sont à dénouer, délacer  ou délier. Tour de tête, col et collier, bretelles, brassières et bracelets. Tour de taille, ceintures et gaines, chaussettes et lacets. La détente ouvre le passage et la matière peut s’écouler vers le fond. On suit le protocole – d’abord l’intention…, qui suscite l’énergie…, qui active le corps dans la forme et le geste.

Et, plus encore, le processus s’active en boucle, le système s’auto-entretient car forme et geste informent l’esprit qui suscite le Qi, qui…,

Il s’agit de maintenir constant et régulier le flux de l’écoulement, la pensée choisissant tantôt la chute à la terre tantôt la remontée par empilement des grains. Le processus favorise une plongée en soi car à la détente active répond une ouverture d’esprit favorable à une attitude plus détendue devant la vie.

La détente active propre au taijiquan se fait alors mode de vie. Une philosophie du bien-vivre qui, au repos ou dans l’action, dans le calme ou dans l’urgence choisit de ne pas se laisser submerger par les effets négatifs du stress en savourant consciemment la détente  .